Beaucoup d’articles sur les adultes surdoués font état de la difficulté à communiquer. La majorité, mais pas tous, a beaucoup de mal à comprendre comment les personnes neuro-typiques fonctionnent, ce qui les motive, ce qui les agace, ce qui les attire…
Beaucoup ont aussi du mal à comprendre, ce qu’ils projettent, ce qu’ils donnent à voir, ce que les autres voient ou pas. C’est un jeu de miroirs plus ou moins déformants où tout le monde, même avec de la bonne volonté, peut se retrouver maltraité.
Le passage qui me semble être incontournable, c’est l’hybridation.
C’est-à-dire que chacun apprenne le langage de l’autre; que les tiers : amis, famille, entreprises, RH, professionnels de l’accompagnement apprennent comment fonctionne une « personne normale avec douance ».
Pour les surdoués, c’est d’abord eux qui vont faire le plus gros travail de réveil ou de désincarcération !!
Le meilleur moyen est d’abord de reconnaitre et accepter qu’on l’est, ou qu’on l’a (le truc) et que ce n’est pas une maladie. Que l’on peut avoir, par ailleurs, des difficultés (dys, tda, trouble du spectre autistique / tsa, asperger, trouble de la personnalité, trouble de l’humeur..) et que ces derniers ne relèvent pas de la douance, ce qui n’exclut pas la possibilité d’avoir une configuration composite.
Il y a très souvent une confusion à vouloir associer des troubles quelconques à la douance. Les troubles, c’est les troubles; la douance, c’est la douance.
Une fois que l’on a traversé tout cela, ce qui prend un certain temps, le plus simple est d’aller chercher tout ce que l’on peut trouver sur les surdoués (sites, forums, livres…) comme une carte ou un extracteur, et d’aller y repérer sa propre singularité. Cette dernière va nous amener, en miroir, à découvrir en quoi nous sommes différents, et donc en quoi le « monde normal type (dans notre société) » fonctionne différemment.
En fait, c’est du « deux en un » travaillant sur une culture singulière : Moi/les surdoués. Je découvre aussi et en même temps l’autre culture dominante : « les autres » dont le HPI se sent souvent décalé. Nous sommes ici dans des principes culturels types, donc cela requiert beaucoup de nuances, de vigilance, dès que l’on approche l’individu.
En résumé, 3 cultures à apprendre et qui se font miroirs :
Les surdoués, les autres dans leur environnement (famille, entreprises, amis, école…), Moi.
Si l’on change de pays et de continent, cela va être un peu différent selon la culture locale du pays et de la manière dont elle intègre, ou pas, les différences et la diversité. Très souvent je dis aux jeunes HPI : partez voir à l’étranger si vous le pouvez ! Quitte à se sentir étranger, on peut plus facilement déployer nos ailes dans un environnement étranger où on va être vu dans une «normalité » visible et invisible.
Je viens encore d’en faire l’expérience au Togo d’où je rentre, avec en particulier une conférence enregistrée pour l’Association des Grandes entreprises du TOGO / AGET. J’ai reçu un accueil magnifique avec des responsables (dirigeants, RH, conseils..) respectueux, bienveillants, ouverts et volontaires pour promouvoir et soutenir cette démarche. Plusieurs étaient concernés, et d’autres ont fini par le savoir.
Article écrit par Fabrice Micheau, orateur du congrès 2016
Lire les travaux de la linguiste kerbrat orrechioni
DCG
merci. je vais aller regarder cela. cdlt
Etant autiste asperger l’hybridation ça ne marche pas de façon toujours évidente! Il est vrai que je suis-vis-travaille-invente-fais de mes mains (je suis vannier, artisan en plusieurs domaines aussi, céramique et calligraphie japonaise). Imprégnation, imbrication, être ce que je fais. En décalage, certes et c’est ainsi. « C’est à dire que chacun, apprenne le langage de l’autre » => cela ne veut pas dire grand chose, pour moi, parce que je remets constamment en question le langage (en français), les mots, les mots-concepts (tandis que le japonais et le chinois n’en comportent pas de ces concepts qui ne disent rien, qui n’expriment ni les « creux », ni les « entre » des choses), je décortique sans cesse… « partez voir à l’étranger si vous le pouvez, quitte à se sentir étranger » Evidemment (que) je suis allé vivre et travailler à l’étranger: Japon et 7 ans en Chine. Hum! Eh non, je me suis modélisé à la chinoise, à la japonaise tout en conservant ma personnalité-spécificité d’autiste.
Bonjour, bravo pour votre parcours
» Penser entre les langues » -) voir travaux de Barbara Cassin.
» S’entendre, c’est comprendre qu’on ne comprend pas »
DCG
Je rentre d’un périple en Asie (Singapour – Phom Penh). Effectivement l’énergie est différente. Et quitte à être étranger, c’est plus facile de l’être ailleurs. C’est pour cela que j’accepte régulièrement les interventions dans d’autres pays (7/8 cette année). Bien évidement l’hybridation a ses limites, quand on a l’impression que l’on va y perdre son âme ou que l’on va mourir à petits feu ou à grand feu. C’est un exercice difficile qui demande parfois beaucoup d’abnégation mais qui offre aussi la possibilité d’avoir plus de marges de manœuvre et de flexibilité. A chacun de trouver sa limite entre compromis (acceptable) et compromission (inacceptable). Et en plus tout cela fluctue au grès du temps, de l’age et des événements. Les typicités Asperger requièrent encore plus de vigilances, d’attentions et d’apprentissages quand le langages est rempli d’implicites, de multi sens, d’approximations, de creux à remplir ou pas. Cela est renforcé aujourd’hui encore plus dans notre monde 2.0 (les entreprises et des gens) dissocié et ou la « novlangue » qui ne veux plus rien dire (c’est le but). Le corps social est touché par une pathologie / trouble de la personnalité grave et contagieuse, d’autant plus quelle se propage en infra-conscience. Et de fait, les personnes « en dehors de la boite » et hypersensibles captent (souvent) plus vite et plus douloureusement ces signaux comme le canari dans la mine : (http://www.histoiresoubliees.ca/article/la-mine-federale/les-canaris-dans-les-mines-de-charbon) ; et parfois au risque des dommages/réactions auxquels ils peuvent s’exposer (syndrome de Cassandre : https://fr.wikipedia.org/wiki/Syndrome_de_Cassandre ).
Bonjour,
Oui
C’est de la négociation permanente.
Être perçu ‘etranger’ à l’étranger c’est partiellement socialement acceptable.
En restant conscient du décalage.
DCG
Très bonne image que celle du canari dans la mine !
La lucidité quant au monde social tel qu’il fonctionne (hypocrisie, non dits, manipulations et enjeux d’égos) me rend parfois malade et j’ai l’impression d’être un des premiers canaris à étouffer. Ca me réconforte de savoir que je ne suis pas seule à me sentir canari… Cependant pouvez-vous développer ce que vous entendez par pathologie du corps social ?
Bien à vous
Aurélie. Désolé, ce sujet est un de mes quotidiens de travail dans les organisations mais c’est compliqué pour moi de développer par mail (2D) ce sujet sensible, complexe et politique. Voir (entre autres) les travaux de Michel Foucault (La société punitive , Surveiller et punir , Le gouvernement de soi et des autres) , Vincent de Gaulejac (névrose de classe, la lutte des places, la société malade de la gestion, le capitalisme paradoxale …) , Valérie Brunel (les managers de l’âme), Nicole Dubois (La norme d’internalité et le libéralisme), Beauvois et Joule (Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens) ……
Sentiment (parfois très puissant) de se sentir beaucoup moins étrangère (étrange) dans un autre pays qu’en France – ce qui nourrit en effet l’envie / besoin de vivre ailleurs. De quel « ailleurs » s’agit-il vraiment finalement ?
Etre plus soi hors de sa terre ….
j’ai beau comprendre comment je fonctionne et essayer d’atténuer ce qui ne » passe pas » dans le monde professionnel, je me sens toujours incomprise et mal considéré , que faire ?
mieux se comprendre au regard de la cartographie HPI. Mieux comprendre le monde normal : sa normalité , ses bizarreries voir ses aliénations. Pour cela, intéressant aussi le dernier livre de Carlos Tinoco (une trés belle contribution) : les surdoués et les autres; penser l’écart et le livre de Patricia Lamare : la théorie de la désintégration positive de Dabrowski, un autre regard sur la douance et les crises.
« a santé mentale n’est pas l’absence de trouble ou de souffrance. Bien au contraire, certaines crises sont indispensables et elles doivent être traversées pour grandir, et ceci même si elles mettent la personne dans un état de très grande détresse. En fait, un état de trop grande adaptation peut simplement être le signe que la personne est incapable d’entreprendre ce chemin, et qu’elle reste l’objet des déterminismes de son entourage. Ou pire encore, il s’agit d’un-e sociopathe ou d’une autre forme de personne incapable d’empathie dont l’humanité souffre tant, mais que les sociétés humaines révèrent et favorisent. » https://labyrinthedelavie.net/2017/09/06/surdouance-dabrowski-et-la-desintegration-positive-enfin-accessibles-en-francais/
Sortir du faux self demande à aller creuser son moi, à ouvrir les portes pour accepter, comprendre, explorer ses particularités, pour mieux se connaître, et surtout pouvoir connaître les autres.
Quelque soit le parcours, il n’est pas possible à une personne non concernée de comprendre les profils atypiques. C’est un peu comme si l’on demandait à une personne atteinte du syndrome de Down de se comporter comme une personne dite « normale ». D’où l’intérêt pour l’atypique de mieux comprendre les différences pour mieux accepter la différence, se mettre à la portée du « Nous » tant qu’il est possible de le faire dans la bienveillance …. et c’est là qu’il y a matière à travailler sur les fondamentaux de la relation interpersonnelle, les valeurs communes et les comportements associés !
Quel enfant a appris à communiquer dès son entrée à l’école ?
Quel enfant a pu apprendre ce qu’étaient les valeurs du vivre ensemble ?
Combien de temps encore pour que le harcèlement ne soit plus considérer comme un jeu au détriment du Je ?
Que cela soit au sein de la famille, à l’école, en entreprise, les personnes sont avant tout sur la compétition et Contre tout ce qui n’est pas à leur portée. L’humilité est pourtant une belle vertu !
Cela amène les profils atypiques qui ne sont pas accompagnés, acceptés, ignorés, à parfois mal tomber. Et dans ce cas, le mal peut se transformer en gangrène émotionnelle.
Oui il faut muter vers une hybridation, rester soi-même tout en modérant sa vitesse de compréhension pour mieux Être avec les autres.
Et comme dit Fabrice Micheau : »Quand un atypique a une solution, ne rien dire, attendre qu’ils se plantent et enfin proposer la solution 🙂 »
Merci Fabrice, à beintôt
Christine
Merci.
Article simple au premier abord, très complexe au second 🙂
Que faire quand on a la preuve noir sur blanc que l’on est concerné par le sujet, mais qu’on n’arrive absolument pas à voir ce qui différentie des autres ?.
est-ce une preuve de la sur-adaptation et d’actions déterminées par les attentes des autres