Ce n’est pas toujours simple de communiquer adéquatement quand on est concerné par le Haut Potentiel. On a souvent l’impression que l’on ne se fait pas comprendre, que l’on n’est pas entendu, pas compris.
Comment exprimer son authenticité pour être accueilli tel que nous sommes ? Comment faire quand nous sommes en désaccord avec l’autre, et que nos émotions nous submergent ? Toute cette série de questions va être abordée avec l’invitée de Nathalie, Muriel Watier, Docteur en psychologie et formatrice en ressources humaines.
Avoir raison vs parler vrai : quelle différence ?
Avoir raison est lié aux six raisonnements existants. Il se peut que l’on n’ait pas forcément le même raisonnement que notre interlocuteur. Quand on communique, on fait référence à notre raisonnement dominant. Selon les pays et les cultures, les raisonnements dominants peuvent être différents en fonction de ce qui a été inculqué.
En France, le raisonnement dominant est le raisonnement déductif. Il est lié à l’esprit de synthèse, qui permet de comprendre et de reformuler. Le second raisonnement dominant va être le raisonnement inductif. C’est cette notion de tenter d’identifier le pourquoi et de classifier les idées. Le troisième raisonnement dominant va être le raisonnement algorithmique, qui est le raisonnement des savoirs.
Quand une personne pense qu’elle a raison, elle utilise un des raisonnements dominants de sa culture ou de son éducation. Avoir raison, c’est être dans son ou ses propres raisonnements. Parler vrai signifie être dans son authenticité, dans son ressenti, dans ses valeurs.
Les autres types de raisonnements
On retrouve principalement :
- Le raisonnement analogique
On aura besoin d’exemples concrets, de se comparer et de comparer les choses. Cela donne l’impression d’être plus limité car on sera toujours sur une perception d’exemples, donc de choses plus diluées. Cependant, un raisonnement analogique est fondamental. Dans toutes les formations, expérimentations, mises en situation, on a besoin d’analogie.
- Le raisonnement intuitif
C’est un raisonnement qui s’adapte à tous les raisonnements. C’est la capacité que certaines personnes ont à comprendre l’ensemble des raisonnements. On le retrouve chez certains hommes politiques, pédagogues, thérapeutes. L’intuitif est caméléon. Il va s’adapter au raisonnement de l’autre, car il va retrouver dans la manière de parler les codes du raisonnement.
- Le raisonnement mnémotype
Celui-ci est particulier, car lié à une incohérence dans une période de vie, comme par exemple un deuil, une rupture, un changement. On va être incohérent, en passant du coq à l’âne, en disant une chose et son contraire… Chez les manipulateurs, c’est le raisonnement le plus utilisé. Une personne lambda l’utilisera plutôt accidentellement en fonction de ces périodes de vie.
Les raisonnements les plus courants chez le haut potentiel
Il y a d’abord l’intuitif que l’on retrouve très souvent. Beaucoup de personnes concernées par la douance sont hypersensibles, même si ce n’est pas systématique. Ce côté caméléon fait que l’on s’adapte, et ce n’est pas évident de savoir quels raisonnements on possède vraiment.
On retrouve également le raisonnement algorithmique, qui concerne la notion de compétence. C’est la capacité de savoir ce qui est très important, de penser détenir des compétences et des savoirs.
Nous avons aussi le raisonnement de bon sens. C’est le côté simple, pratique et concret des choses. On savoure ce que l’on a avec plaisir, en ne se focalisant pas sur ce que l’on n’a pas. C’est un raisonnement qui est beaucoup perturbé quand il y a des crises.
Si on a activé un type de raisonnement, on a la possibilité de le développer. Même si celui-ci n’est pas dominant, on peut le travailler toute sa vie. En revanche, si certains raisonnements n’ont jamais été activés, il sera impossible de les travailler. On a alors intérêt à activer le plus de raisonnements possibles, pour que l’enfant et l’adulte puissent avoir un réservoir de manières de comprendre le monde.
Conseils pour les HPI qui ont du mal à se faire entendre
Ce n’est pas toujours facile pour une personne concernée par le Haut-Potentiel de se faire comprendre. Dans certaines situations, intuitivement, elle sait qu’elle a raison de part son expérience, intuition ou autre élément. On pourrait lui conseiller d’expliquer les choses plus en détails à son interlocuteur, et d’être précise sur les raisons qui lui ont permis d’établir ce qu’elle avance.
Souvent, certains HPI vont à l’essentiel. Ils n’aiment pas perdre du temps. Ils expriment directement une réponse ou un résultat, et pas forcément le cheminement qui a conduit à ceux-ci. Il est important, pour les personnes en face de nous, de pouvoir comprendre pourquoi on dit cela de telle façon, et quel est le cheminement qui a permis d’aboutir à ces conclusions.
Avoir raison, c’est être dans son raisonnement et penser que c’est le seul. Le problème est que l’on ne nous a pas forcément appris qu’il en existe d’autres. L’autre n’a pas assurément le même raisonnement. Il faut donc accepter le fait que notre raisonnement n’est pas forcément celui de notre interlocuteur, et que pour cette raison, on n’arrive pas aux mêmes conclusions.
Il faut savoir qu’il n’y a pas que les raisonnements qui peuvent être pris en compte. Il y a aussi les idées ou encore les opinions. Ce qui va être important est de pouvoir écouter ce que l’autre veut dire à travers ce qu’il dit. Qu’est-ce qui lui tient à cœur ? Qu’est-ce qui est perçu à travers ses paroles ? On va alors retrouver soit une notion d’implicite, soit une notion d’objectif.
C’est pour cela qu’il est important d’identifier le rôle que l’on a, la place et la légitimité que l’on a à parler de tel sujet. C’est en fonction de cela que l’on peut avoir plus “ vrai “ que raison, car “ vrai “ c’est accepter qu’il n’y a pas qu’une seule vérité.
Quand on essaye d’avoir raison, il y a un rapport de force. On ne veut pas comprendre l’autre. On veut imposer et convaincre, car on est dans une négociation pour prouver. Alors que parler vrai, c’est plutôt exprimer. L’autre a le droit de ne pas être d’accord, du moment qu’il a compris. Il a ce droit, car il est différent.
Les clés pour prendre du recul quand nous ne sommes pas entendus
Dans certaines situations, on peut être en souffrance quand on ne se sent pas compris. Dans ces moments-là, on n’a plus nécessairement le recul car la charge émotionnelle est trop importante.
Muriel Watier propose une petite astuce qui consiste à avoir toujours une petite bouteille d’eau avec soi. Quand on se sent perturbé émotionnellement, on en prend alors une gorgée. En avalant, on va essayer de suivre cette gorgée le plus loin que l’on peut. Cette action permet de s’hydrater, de déglutir, de ne faire qu’une seule chose à la fois et enfin, de réactiver la concentration et l’attention. Ce petit exercice permet d’avoir une autre façon de réfléchir et de prendre du recul par rapport à la situation. On peut également pratiquer des exercices de respiration.
Pourquoi ne faut-il pas se taire ?
L’idée n’est pas de se taire et de s’adapter. Il est essentiel de continuer à exprimer ce qui est important pour nous, tout en étant à l’écoute de l’autre.
Le propos n’est pas de formuler en se disant que l’on a raison. L’idéal est de formuler en étant vrai, en sachant que l’on peut ne pas avoir de l’écoute en face, ou encore avoir des personnes qui pensent qu’elles ont raison. Ce n’est pas pour cela qu’il faut continuer à se taire.
Se taire, c’est renoncer; c’est avoir une période de repli. Quand on est perturbé émotionnellement, on peut se taire momentanément, mais surtout ne pas renoncer. Il est question d’y revenir, de peut-être poser par écrit certaines choses. On peut également contacter d’autres personnes pour exprimer ce dont on a besoin. Il est question de le faire autrement, mais pas toujours de se taire sur le moment.
Ce n’est pas parce qu’une personne n’a pas entendu sur le moment qu’elle n’entendra jamais. Nous avons tous des choses à faire germer à l’intérieur. La parole est une manière de faire germer tout ça. Si on se tait, on ne germe pas et on ne fait pas germer.
Effectivement, il y a de part et d’autre des choses à modifier et à composer, surtout si l’intensité émotionnelle bien connue des hypersensibles et des HPI peut connaître des effets yoyo.
Il faut savoir que l’on ne va pas forcément être entendu ou compris car en tant que haut potentiel, on a des raisonnements qui sont différents. Mais il ne faut pas se taire pour autant. Nous attendons souvent un retour de la part de l’autre, qui parfois ne vient pas ou peut intervenir bien plus tard. Si on a un retour, c’est génial. L’important est aussi de fonctionner selon sa motivation et son envie. On verra bien si l’on trouve son public de suite ou pas.
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