Quand on est multi potentiel, qu’on aime faire beaucoup de choses et que l’on réussit, les personnes autour de nous ont très souvent l’impression que tout a toujours été facile : à l’école, dans sa famille, etc. Comme si on était né avec ce potentiel qui nous permettrait de tout réussir.
Ça peut être le cas pour certaines personnes, mais pas pour Martin Latulippe, qui partage son parcours de vie. Il a rencontré des difficultés à l’école, a vécu des troubles de l’apprentissage, comme la dyslexie. Toute une série d’éléments ont été des obstacles sur sa route et pourtant, il a réussi à les franchir. Dans cette interview, Martin Latulippe donne des conseils pour pouvoir dépasser ces freins, même si on a une trajectoire qui n’est pas simple.
Le sentiment de décalage pendant l’enfance
Martin était un petit garçon qu’on pourrait considérer comme ordinaire, avec beaucoup d’amis. Très vite, il a commencé à se comparer à ses camaradas et à remarquer ses différences sans toutefois les comprendre. Cela le faisait se sentir inférieur aux autres. Il avait cette même impression avec ses enseignants et son entourage, car on lui rappelait souvent qu’il n’était pas comme son frère. Son frère avait un fonctionnement très « militaire ». Dès son plus jeune âge, tout était millimétré et carré. Il fonctionnait dans le cadre, était le premier de sa classe, se présentait aux élections scolaires… Alors que Martin Latulippe, lui, était rêveur et aimait toucher à tout.
Son parcours a été relativement ordinaire jusqu’à la fin de l’école primaire. Lorsqu’il est arrivé à l’école secondaire, au lycée, où les exigences académiques étaient plus difficiles, les défis que rencontrait Martin et dont ils ne comprenaient toujours pas la source, se sont multipliés.
C’est là qu’il a commencé à avoir des résultats scolaires catastrophiques en raison de sa dyslexie, sa dyscalculie et ses troubles d’apprentissage. Il se souvient très bien de ses examens de mathématiques, face à une page blanche. Il ne voyait plus rien tant il était dans un état de panique, et obtenait finalement un résultat médiocre. En arrivant chez lui, ses parents lui disaient qu’il ne faisait pas d’effort. À cette époque, il faut comprendre que l’on n’avait pas de « diagnostic » pour le haut ou multi potentiel.
Travailler son estime de soi quand on craint le regard des autres
En tant qu’enfant et adolescent, Martin Latulippe était très affecté par l’image que les autres percevaient de lui. Lorsqu’il savait que telle personne allait être présente, il faisait parfois des crises d’anxiété. Plusieurs jours avant un événement important, des plaques rouges apparaissaient sur son visage et sur son cou, car il ne mettait pas son énergie au bon endroit. Il craignait qu’on voie ses différences et que l’on remarque qu’il avait des faiblesses. Son égo tentait de le protéger.
Il faut être parfait, bon étudiant, sage, etc. Cette construction identitaire est souvent projetée par l’égo de nos parents, qui devient ensuite le nôtre. On se dit qu’il faut à tout prix cocher toutes ces cases, et au final, on ne se sent pas bien. On rentre dans une course folle à vouloir être doué pour répondre à des standards qui on été établis par une société d’il y a plusieurs décennies, et qui a défini un modèle.
On demandait à Martin Latulippe d’être doué partout. Lui, il essayait simplement d’être bien. Cet écart a été pour lui difficile à gérer : opinions des autres, critiques de son entourage… Il s’enfermait beaucoup. Il s’isolait et se privait de faire certaines activités. Il vivait tout cela en silence. Personne ne savait qu’il expérimentait cela intérieurement. Il s’est parfois confié à des personnes de confiance mais à chaque fois, on lui répondait que ce n’était pas possible qu’il souffre. Son entourage ne voyait pas la souffrance intérieure qu’il vivait dans sa tête, dans son cœur et dans son ressenti.
Après un travail auprès de mentors, il a compris qu’il y a des personnes qui vivaient la même chose que lui. Il a pu comprendre qu’il pouvait changer son regard sur l’opinion des autres. S’ouvrait alors la perspective de pouvoir construire une nouvelle identité, dans laquelle il n’avait pas nécessairement à être doué aux yeux de tout le monde, dans laquelle il pouvait faire ce qui est bon pour lui et se sentir bien. Ce qu’on pense de lui lui est alors devenu égal, car on ne peut pas plaire à tout le monde. Il a enfin pu faire la paix avec cela.
Quand Martin Latulippe a commencé à comprendre ces dynamiques-là, il a enfin pu se permettre d’enlever cette fausse pelure identitaire qu’il s’était construite : “je dois plaire à tout le monde“, “je dois être bon partout“, “ils doivent m’aimer“, etc. Tout cela est de l’égo et par conséquent, une fausse construction identitaire. Finalement, il a enlevé ses fausses pelures pour aller dans sa vraie intériorité, vulnérabilité, humilité et détachement.
À ce moment-là, lentement mais sûrement, avec le temps, Martin a commencé à se rapprocher de sa vérité et à se diriger vers le « laisser-aller ». Une des plus grandes clés du bonheur est de se connaître. Il existe certains mécanismes qui peuvent nous faire défaut. Il est important d’avoir les outils pour mieux les gérer, car ils ne vont pas forcément disparaître. Martin confie que cela lui arrive de basculer dans un état d’anxiété, ou vers le fait de se comparer. C’est un « auto-pilote » qui fait partie de lui, de son ADN. Il faut donc avoir des outils pour recalibrer le tout, des points d’ancrage, des repères qui sont siens, basés sur des expériences positives et plus constructives. C’est important de garder en tête ces expériences qui nous ont prouvé que l’on peut penser différemment. Il faut retourner vers ces souvenirs-là pour souffler un peu.
Ecouter son corps pour prendre des décisions
Le corps est un élément essentiel. On peut avoir du mal à se connecter à nos ressentis, de peur de faire monter les émotions en nous. Quand on a une décision à prendre, la meilleure option est d’aller chercher le calme à l’intérieur de soi. Même si cela prend plusieurs jours, il faut trouver des espaces les plus calmes possibles, comme dans la nature ou son salon par exemple, puis calmer sa respiration.
On peut par exemple visualiser un lac, et se demander si notre esprit est actuellement agité. Si c’est le cas, cela signifie que notre prise de décision va être basée sur la réussite, le besoin de désir de réussite, ou de désir d’accomplissement. Dans ce cas, ce n’est pas bon signe. Il faut réussir à calmer notre esprit, à calmer le lac en fermant les yeux, en faisant des méditations, et en essayant de se connecter à notre ressenti. On peut se demander ce qui nous a rendu le plus heureux dans notre passé, ce qui nous apporte de la joie, avec quel type de personnalité on aurait aimé collaborer, rire, contribuer. À ce moment-là, les émotions vont augmenter. Les ressentis seront liés à des souvenirs, à des images qui nous reviennent comme référence. Cela nous amène dans ce ressenti que l’on recherche pour se dire que le lac est calme. Ce sont les conditions que l’on souhaite et qui nous font du bien.
Martin Latulippe tient à préciser qu’il ne souhaite pas que les personnes pensent qu’il juge ceux qui sont dans la recherche de réussite et d’accomplissement. Ce point de vue sur le détachement qu’il a aujourd’hui date seulement de quelques années. Il n’y a aucun mal à chercher la réussite, à vouloir créer sa prospérité et sa richesse. Bien entendu, on peut par la suite vouloir s’accomplir un peu. L’important est de le faire en suivant nos valeurs.
Les clés pour accueillir sa singularité
La première clé est de ne pas commettre l’erreur de confondre la simplicité de l’idée avec son efficacité. Souvent, le cerveau écoute l’idée. Puis parce que c’est trop simple, il va se dire que ce n’est pas cela qui va faire la différence. On va penser que pour nous c’est différent, que c’est pire que pour les autres. On se dit que cette petite clé ne peut pas nécessairement être aussi efficace pour commencer à nous aider à faire un pas dans les bonnes actions.
Ne faites pas cette erreur-là. Rappelez-vous que peu importe la grosseur des portes que l’on rencontre dans la vie, contre lesquelles on bute constamment, c’est une toute petite clé qui permet de les ouvrir. C’est la même chose avec la vie. Souvent, ce sont des toutes petites clés qu’on va se mettre à appliquer avec constance et assiduité qui vont faire en sorte que l’on va faire des gains exponentiels dans notre façon d’être, notre façon de vivre et surtout, dans notre façon de nous ressentir nous-même.
La deuxième clé serait de faire attention aux sens que l’on attache aux événements. Le multi potentiel peut être très doué pour se raconter des scénarios qui vont partir dans une spirale incontrôlable. Cela va être hyper toxique. Que ce soit par rapport à des personnes que l’on rencontre, des échecs, des expériences de vie, ça peut être la catastrophe totale. Si on visualise l’image de la clé, il y a un côté qui est droit, et l’autre côté qui est dentelé. On aimerait tous que la vie soit comme le côté droit de la clé : sans anicroche, sans obstacle. La vie serait comme un long fleuve tranquille, et ce serait tellement fantastique. On obtiendrait tout du premier coup ! Mais en réalité, la vie ressemble plutôt au côté dentelé de la clé. Il y a des hauts et des bas. Mais en regardant cette image de la clé, on réalise que c’est cette combinaison des hauts et des bas qui fait en sorte qu’une porte va pouvoir s’ouvrir. Et si c’était la même chose dans notre vie ? Lorsque l’on expérimente des obstacles, on est juste en train de denteler la clé de notre vie pour ouvrir notre prochaine porte et notre prochaine opportunité.
En étudiant la psychologie humaine, on découvre qu’un des plus grands déterminants dans le bonheur et la réussite d’un individu, c’est le sens qu’il attache aux événements. Il faut faire attention à cela. Nous ne sommes pas les événements que nous vivons. Nous ne sommes pas nos échecs ou nos victoires. Nous ne sommes pas les critiques que l’on a pu entendre sur nous. Nous sommes bien plus que cela.
La troisième clé s’adresse à tous les êtres humains et pas seulement aux multi potentiels. C’est de cultiver, célébrer et constamment choisir tous les jours cette opportunité que l’on a de s’émerveiller. Il n’y a pas une posture plus humble que celle de ne jamais tenir pour acquis la nature qui nous entoure, le miracle de la vie : les nuages, l’eau, un enfant qui rit, une personne âgée qui embrasse son amoureux…
On peut arriver à un point de notre vie où l’on devient cynique, où plus rien ne nous impressionne, où on trouve que la vie est grise… On oublie à quel point tout est magique. Très souvent, de façon concrète, on peut prendre le temps de se concentrer sur des éléments de la nature. On doit réussir à obtenir la capacité de s’émerveiller sur le fonctionnement des choses, sur la magie de la vie, sur les petits moments magiques. On rencontre souvent des personnes qui sont indifférentes à cela, alors qu’elles auraient juste à commencer avec cette clé pour réaliser qu’elles sont responsables de leur malheur, de leur attitude, simplement parce qu’elles ont oublié que le simple fait de participer à cette magie est un privilège. Il faut recommencer à s’émerveiller. Quand on n’apprécie plus les petites choses de la vie comme le fait de boire un café chaud le matin, on fait un faux pas sur le chemin vers une vie épanouie.
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