Élodie Crépel, psychanalyste, médiatrice familiale, spécialisée dans la douance et l’hypersensibilité nous parle de son livre : « Femme Atypique ».

Pourquoi un livre sur les femmes atypiques ?

Élodie Crépel est suivie sur ses réseaux sociaux et notamment sur Instagram majoritairement par beaucoup de femmes. Il y a des problématiques qui reviennent de manière récurrente, et elle se rend compte que les femmes ont des problématiques spécifiques.

Plus elle accompagnait ces femmes, plus elle se disait qu’elles ne pouvaient pas trouver leurs réponses, car elles n’étaient nulle part.

Aujourd’hui, le domaine de l’atypie au sens large est souvent biaisé par une vision plus masculine : au final, on ne parle pas de certaines particularités. Élodie Crépel a pu développer cet aspect dans les coachings, dans les médiations, dans les accompagnements et a eu l’idée de rassembler tous ces éléments dans un livre.

Elle pense que la montée du féminisme actuel le permet aussi, et que ce livre aurait été trop novateur il y a quelques années alors qu’aujourd’hui il trouve du succès car cela parle aux femmes.

Ce livre arrive à un moment où les femmes ont probablement envie d’assumer le fait d’être atypiques et de le développer davantage.

Femmes atypiques : quelles sont les difficultés ?

La difficulté première des femmes est de se légitimer dans le fait de se demander si elles sont atypiques. Beaucoup de femmes pensent ne pas être pertinentes pour se poser cette question, ou simplement pour oser le penser. Cet aspect est très féminin.

Ce qui est très significatif, c’est que beaucoup de femmes viennent à Élodie par le biais de leurs enfants. Elles ont découvert l’atypie de leur enfant et se questionnent sur elles-mêmes, parce qu’elles se voient à travers lui.

Lorsqu’un professionnel annonce aux parents que leur enfant est atypique, il leur demande s’il peut y avoir une hérédité et à ce moment-là, la plupart des mères disent que cela vient forcément du côté paternel. Cet aspect là, on ne le retrouve pas chez les hommes.

Lors d’un test de douance, la majorité des hommes vont ressentir un soulagement parce qu’ils ont un début de réponse. Alors que les femmes vont se retrouver perdues, auront beaucoup de mal à l’accepter, ce qui leur demande plus de temps, et vont également passer par ce moment de déni.

C’est comme s’il y avait une période de deuil avec plusieurs étapes avant l’acceptation de leur atypie, car cela les bouleverse.

Les personnes qui osent acheter le livre d’Élodie Crépel, lui disent que c’est un grand cap pour elles. À celles qui n’osent pas le faire pour elles-mêmes car ne se sentent pas prêtes, Élodie propose de l’offrir à une femme atypique de leur entourage et très souvent, elles se surprennent à finalement le feuilleter.

Le syndrome de la « caméléone » chez les femmes atypiques

Tout le monde peut faire le constat qu’en entreprise les femmes occupent souvent la deuxième place. Dans les grandes entreprises, elles sont souvent le bras droit d’un homme. La charge mentale et toutes les occupations qu’elles font sont incroyables. Les femmes vont même au-delà de leur mission en entreprise, mais ne seront pas en première place et n’auront ni la considération sociale, ni le salaire en conséquence.

On retrouve cela dès l’enfance : c’est-à-dire qu’il y a beaucoup de femmes atypiques qui vont témoigner qu’elles préféraient par exemple être la deuxième de la classe pour ne pas se faire remarquer, ou pour ne pas faire de la peine à une amie. Ceci ne concerne pas les petits garçons car ils ont moins de difficulté et seront généralement beaucoup plus testés dans leur atypie.

Finalement, les femmes vont utiliser toutes leurs compétences pour mettre en place des stratégies pour rentrer dans la norme, pour se «  caméléoniser ».

Dans son livre, Élodie évoque le syndrome de la « caméléone » et non pas du caméléon, parce qu’elle pense que l’on ne peut pas nier le sexisme ordinaire dans lequel nous baignons tous sans nous en rendre compte. C’est pour cela qu’il est ordinaire et impacte notre propre vision des choses. Forcément, dans le monde du travail cela se remarque : on sait très bien qu’aujourd’hui les différences entre les hommes et les femmes sont très marquées et marquantes.

Aujourd’hui, être chef d’entreprise en tant que femme, être à son compte, réussir professionnellement, apporte souvent un malaise par rapport aux femmes.

On retrouve chez les femmes atypiques cette envie de se révéler, de changer le monde, de donner du sens dans ce qu’elles font, même si elles décident de ne pas travailler. 

Il y a une frustration, un blocage et on n’arrive pas à le voir. On a tendance à se remettre en question ou à se replier sur soi et à se dire que l’on n’a pas sa place. Chez les personnes atypiques, cela amène beaucoup de conséquences négatives : une sorte de dépréciation sur soi qui va engendrer un renfermement et elles ne vont pas s’épanouir. Cela peut générer un burn-out et de la dépression.

«Femme atypique» : ça englobe quoi ?

Tout le monde est atypique, dans le sens où tout le monde est singulier. Le terme atypique est une diminution du terme neuro-atypique qui signifie que l’on a un fonctionnement du cerveau qui est différent d’une norme donnée. Scientifiquement, on se rend compte que si on fait le test par IRM, certains cerveaux fonctionnent de manière différente; et on y met toutes les neuro-atypies possible :

– La douance ; le fait d’être surdoué ou haut-potentiel intellectuel,

– L’hypersensibilité que l’on peut nommer haute-sensibilité ou encore haut-potentiel sensible,

– Les troubles Dys,

– Le TDH : le trouble de l’attention et/ou l’hyperactivité,

– Le spectre autistique.

Dans son livre, Élodie développe beaucoup plus ce qui est du domaine de la douance et de l’hyper-sensibilité. Elle parle succinctement du TDH et de l’autisme, car elle est formée à cela également. Elle ne pose pas d’étiquettes, parce que les personnes neuro-atypiques ont souvent plusieurs atypies, il est rare de n’en avoir qu’une seule. Souvent cela s’imbrique et parfois, elles se cachent les unes avec les autres et on ne s’en rend pas toujours compte.

Élodie parle donc de l’atypie au sens large.

femmes atypiques en entreprise : quelles problématiques ?

Élodie croit qu’il y a un problème de légitimité et encore plus dans le monde professionnel. Les femmes atypiques n’osent pas car souvent elles font face à de l’incompréhension, du jugement, à des phrases clichées qui reviennent souvent lorsque l’on entend les témoignages :

« Elle est hystérique » « A-t-elle ses règles ? » «  Ça doit être hormonal »

Elles sont obligées de les prendre avec beaucoup d’ironie, ce qui est du domaine de l’intolérance par rapport à leur genre. Elles doivent fournir deux à trois fois plus d’efforts pour démontrer qu’elles ont leur place. Cela demande une énergie considérable pour s’adapter, voire se sur-adapter. Si on met cette énergie dans un domaine, on ne peut pas le mettre ailleurs car nous sommes tous des êtres humains. Si vous mettez 80 % de votre énergie dans vos relations au travail, forcément il ne reste seulement que 20 % pour tout le reste de votre vie.

Les femmes atypiques sont donc beaucoup plus soumises d’une certaine manière à des choses un peu plus difficiles, comme le perfectionnisme qui n’est pas une qualité, car les personnes perfectionnistes en souffrent énormément. Le monde du travail nous pousse dans ce sens. Ce sont souvent des personnes avec une grande exigence personnelle et c’est ce que l’on retrouve plus chez la femme que chez l’homme atypique.

La personne atypique se fixe tout de même un objectif. Mais dès qu’elle l’approche, elle relève de suite le niveau de cet objectif. De ce fait, c’est comme si elle n’atteignait jamais ces objectifs ; ce qui peut générer beaucoup d’épuisement et un manque de confiance en elle. Cela va nourrir cette légitimité à se demander si on est une personne atypique, car elle va penser qu’elle ne fait rien d’exceptionnel et c’est toujours ce cercle vicieux.

Il y a une méconnaissance de soi qui fait que ces personnes ne peuvent pas développer leur potentiel, elles ne peuvent ni l’exprimer ni communiquer sur leurs particularités. Elles vont se retrouver bloquées dans un moule qui ne leur correspond pas et vont avoir une dépréciation d’elles-mêmes alors qu’elles fournissent beaucoup plus d’effort que les autres pour essayer de s’adapter.

La multipotentialité chez les femmes atypiques

En France, on va être vu comme une personne instable si on a plusieurs expériences professionnelles différentes. C’est la culture de l’élitisme, d’être expert dans un seul domaine.

La multipotentialité ne consiste aucunement en cela : c’est-à-dire que l’on va toucher et se passionner sur beaucoup de domaines, et même être expert dans ces domaines.

Selon la culture dans laquelle on est, cela peut être vu plus ou moins positivement. Cela impacte la vision que l’on a de soi.

Si on fait face à des personnes qui vous trouvent bizarres ou qui pensent que rien ne vous passionne, cela peut créer des croyances limitantes. Vous allez vous dire qu’il faut absolument que vous trouviez le centre d’intérêt, la passion qui va vous motiver alors que chez les personnes atypiques, cela ne fonctionne pas du tout de cette façon. Là encore il y a plein d’aspects à déconstruire.

Quels profils chez les femmes atypiques ?

Élodie présente huit profils dans son livre car finalement , c’est ce qui revient le plus lorsqu’elle observe les femmes atypiques autour d’elle. Un test se trouve au début du livre pour permettre de se positionner, mais il n’est pas présent pour poser une étiquette, car les tests de personnalités ne fonctionnent pas chez les personnes atypiques : si elles font le même test à deux moments différents de la journée il est fort probable qu’elles n’obtiennent pas le même résultat. Les personnes atypiques évoluent très rapidement, la sphère cognitive émotionnelle est extrêmement dense et intense.

Le but étant de faire une photographie à l’instant T des problématiques qui ressortent le plus aujourd’hui dans la sphère professionnelle. Si la personne fait ce test au début de la lecture du livre, il pourrait être intéressant de le faire à nouveau à la fin du livre. Et si les résultats diffèrent, c’est qu’il y aura peut-être le besoin de travailler sur d’autres choses.

Quand on est atypique, plusieurs profils se mélangent. Souvent on en trouve deux, trois voire quatre qui vont sortir du lot et c’est tout à fait normal.

Élodie invite ses lecteurs à sortir de cette entrave à la liberté, de savoir qui ils sont, car ils sont atypiques et ils doivent « penser » atypique, et ne surtout pas se contenter de cadres qui sont pour les neuro-typiques, car ce n’est pas fait pour eux.

Élodie a tenu à personnifier les profils car pour elle c’est plus important, cela va au-delà d’un syndrome ou de difficultés : il s’agit de personnes. Une personne est complexe, entière, et a plein de particularités incroyables.

Élodie a donné un prénom aux profils pour inviter à chaque début de chapitre à se mettre à la place de cette personne soit pour soi-même, soit pour découvrir les aspects de personnes que l’on côtoie dans sa sphère professionnelle. Cela invite à cette ouverture et à cette solidarité féminine de comprendre qu’il y a d’autres femmes atypiques et qu’elles sont toutes différentes avec leur particularité.

Femmes atypiques : et si vous osiez ?

Élodie pense vraiment qu’il faut que ces femmes osent passer le cap et qu’elles réalisent que leur particularité peut être un véritable atout.

On s’est persuadé qu’il ne fallait pas se mettre en avant au risque d’être rejeté et d’être incompris. Ces femmes ne comprennent pas leurs propres particularités et pensent de cette manière, ce qui fait un effet miroir.

Du moment que l’on se comprend réellement, on peut mettre des mots sur des maux.

Savoir certaines spécificités permet de l’expliquer aux autres, même s’ils ne l’acceptent pas. Cela légitimerait tous les comportements et cela va rassurer.

Si on n’explique pas les choses, on tombe dans l’interprétation, et cela également dans le milieu du travail. Si les personnes ne comprennent pas pourquoi vous êtes différents, elles vont mal interpréter et cela va vous faire du mal et vous allez vous renfermer à nouveau.

Passez le cap d’essayer de vous comprendre et de vous persuader que vous pouvez apporter quelque chose et que vous pouvez faire la différence avec vos particularités.

Dans le monde du travail, il est normal de vouloir s’épanouir professionnellement aussi en tant que femme. On a le droit d’être heureuse au travail, de vouloir réussir et cela n’enlève rien aux autres ou à notre féminité, bien au contraire, on a notre place : il faut la prendre finalement.

Quelles clés pour avancer avec sa singularité ?

Pour Élodie, il faut se lier avec d’autres femmes atypiques. C’est pour cela qu’elle a voulu mettre cette solidarité au sein de son livre afin que les lectrices puissent se dire qu’elles ne sont pas seules. Trouver des homologues femmes atypiques, même si on est toutes colorées de manières différentes et se dire que l’on peut s’inspirer et s’aider avec d’autres femmes atypiques : cela peut être un tremplin pour réaliser que c’est possible.

Ce qui est important est de parler de ce sujet afin de le rendre encore plus visible.

Élodie propose à la fin de son livre un #femmeatypique car elle pense que cela peut être un cap sur les réseaux sociaux. On connaît aujourd’hui la force des réseaux sociaux : cela permet de planter des graines et plus une chose est visible, plus on l’accepte et enfin les mentalités changent.

Si vous n’arrivez pas à passer le cap pour vous, offrez le livre à une collègue ou à une amie. Et dès lors elle fera peut-être un petit pas pour vous et ainsi de suite, et cela va faire remonter que vous êtes une femme, atypique, qui a envie de s’épanouir au travail et c’est normal.

Vous avez besoin d’être compris dans votre fonctionnement atypique, d’avoir des clés pour vous motiver et avancer en lien avec ce qui est juste pour vous ?

Vous voulez apprendre à vous respecter sans vous sur-adapter et vous épuiser ? Cliquez sur le bouton ci-dessous !