Pourquoi la population Haut Potentiel est-elle particulièrement concernée par le burn-out ? Comment peut-on y voir une opportunité ? 

Nathalie échange avec Bénédicte Costedoat-Lamarque, experte dans la transformation du burn-out et plus particulièrement auprès des personnes concernées par la douance. Elle accompagne également des dirigeants et équipes dans leur transformation personnelle et leur transformation d’entreprise. Son expertise est très intéressante car on sait que le burn-out prend souvent racine dans le monde professionnel.

Le burn-out : c’est quoi ?

Le burn-out est un épuisement total mental et physique. Cependant, il ne se réduit pas qu’à cela. Le burn-out est souvent vu comme un signe de faiblesse, une difficulté que l’on peut avoir à certains moments de sa vie.

En réalité, c’est aussi un effondrement physiologique. Au niveau des neurotransmetteurs et des hormones, le taux de cortisol chute radicalement. De même que la dopamine, sérotonine, etc.

Ce n’est pas juste que l’on ne se sent pas bien dans la tête. C’est au niveau global que le corps dans son ensemble, y compris psychiquement, arrive au bout de sa capacité de fonctionnement.

Les indicateurs du burn-out

La fatigue physique est l’un d’entre eux. On commence à se sentir très fatigué. On ne récupère pas quand on dort. On ressent une forte usure qui se cumule avec la fatigue.

Si on part durant trois ou quatre semaines en congés et qu’à notre retour on est toujours fatigué, usé, au moment de reprendre le travail, c’est un signe que l’on est en pré burn-out, ou peut-être déjà en burn-out. Quand on part une semaine, que l’on passe de bons moments en famille ou autre, et qu’à notre retour on se sent bien, c’est que c’était juste un coup de fatigue passagère.

Le burn-out n’est pas passager. C’est quelque chose de très profond qui s’installe et qui va miner de l’intérieur, avec évidemment des profils plus à risque que d’autres. Quand on est en congés, on sort de son environnement, on n’est plus en train d’utiliser des schémas de fonctionnement qui nous mettent en butée. Les congés sont un moment où on est plus libre. On a moins de contraintes et de cogitations. L’esprit est aussi focalisé sur des sujets différents : la famille, prendre son temps, se relaxer, etc. Ces schémas qui viennent nous mettre en butée sont moins sollicités. Par contre, quand on revient au travail, fatalement on remet en œuvre ce qui nous permet de fonctionner de la manière dont on a l’habitude de fonctionner. C’est pour cela, que l’on revient immédiatement en butée.

Burn-out : toujours lié au domaine professionnel ?

C’est essentiellement lié au professionnel, mais on observe aussi des burn-out parentaux.
Dans ce cas, cela est souvent lié à des questions beaucoup plus profondes : quelle est notre place, quel est le sens de notre vie ?

On se sent perdu. Ce que l’on faisait jusque là perd son sens. On ne se retrouve plus ou on souffre de ce qu’il se passe.

On associe plus généralement le burn-out à l’environnement professionnel. Bénédicte Costedoat-Lamarque a observé qu’en réalité, la vie est intelligente et nous met sous les yeux ce que l’on a à voir de nous-même.

Il est probable que le déclencheur le plus visible et le plus évident soit le déclencheur professionnel. Elle a aussi observé dans sa vie et auprès des personnes qu’elle accompagne, que cela vient s’exprimer d’une certaine façon. On ne fait peut-être pas de lien sur l’aspect familial, amical, sur l’aspect du sens profond de sa place dans la vie que l’on est en train de mener. C’est plutôt multifactoriel, et cela confirme l’intelligence de la vie.

La vie nous met face à des moments et des obstacles qui en même temps peuvent s’avérer être de belles opportunités. C’est souvent la question du sens qui revient au niveau du burn-out. C’est un peu comme si on avait un cheminement que l’on s’est tracé. On se trouve en accélération sur cette voie pour diverses raisons personnelles et à un moment, il y a une bifurcation. On est tellement dans l’accélération que l’on ne la voit pas et on continue tête baissée dans ce que l’on croit être juste.

Cependant, il y avait cette bifurcation et c’est celle-ci qui était pertinente pour continuer notre voie. Si on avait bifurqué, on aurait continué à cheminer dans notre carrière ou autre. Alors qu’au bout de cette voie que l’on poursuit avec intensité, il y a un mur. Et même si on peut s’en apercevoir, notre tempérament fait que l’on se dit que ce n’est pas possible, que l’on sera capable de freiner avant. En réalité, on se prend ce mur de plein fouet. L’avantage est que l’on s’effondre au pied de ce mur et une fois que l’on ne peut plus bouger, il nous reste cette opportunité de regarder cette petite bifurcation au loin pour la rejoindre et de regarder ce qui est, à commencer par soi.

Cela explique que certaines personnes qui vivent un burn-out ne vont pas nécessairement retourner au même endroit, dans le même travail ou dans la même fonction. Souvent, les personnes ne retournent pas dans le même environnement professionnel car elles pensent que si on change l’extérieur, cela va aller mieux à l’intérieur. C’est une erreur. Le fait de penser cela fait que ces personnes vont changer de travail ou de fonction, et referont un autre burn-out.
Le taux de rechute est de 30 à 40 %. Ce qui fait que l’on ne refait pas de burn-out est d’accepter ce que l’on ne voulait pas ou encore ne pouvait pas voir de soi. Cela fait qu’à un moment, en se regardant droit dans les yeux, on aperçoit ces chemins de fonctionnement internes qui nous mettent en situation d’aller dans le mur.

Accepter son burn-out pour aller vers la guérison

Bénédicte Costedoat-Lamarque partage qu’il ne s’agit pas de” guérir”. Le burn-out est une opportunité d’accélération de soi. C’est comme une aide à la construction de soi. Ce n’est pas le sujet de guérir, mais plutôt de gagner du temps dans sa vie pour se mettre le plus au clair avec soi-même, grâce à cet événement de vie qui vient nous fouetter radicalement.

Nos armures explosent et de fait, on a accès à notre matière intérieure. C’est une grande opportunité. Il ne faut pas se dire que l’on doit se soigner, car on n’est pas malade. On n’a rien à attendre. On doit exploiter tout ce temps présent pour en faire quelque chose dès le départ, et c’est cela qui va nous permettre d’avancer. Soit on le subit, soit on le transforme. Il y a invitation à plonger en soi afin de s’aligner et éviter le piège de se dire que c’est l’environnement qui génère le burn-out.

En ayant traversé son propre burn-out, Bénédicte s’aperçoit que cela génère un ancrage et une stabilité intérieure. Cela ne signifie pas que l’on ne va pas être chahuté par la vie et que tout est réglé. On a encore toute la vie pour cheminer. En tout cas, il y a un certain nombre de sujets qui se légitiment, qui s’installent, qui s’ancrent et qui sont des facteurs très importants de stabilisation.

Lorsque cette stabilisation est présente, elle constitue par nature une protection car on est bien au clair avec soi. On n’est plus en train de se faire chahuter sur les sujets qui ont été travaillés pendant le burn-out. C’est en travaillant sur ces éléments-là que l’on peut faire face à la réalité.

Quand on se retrouve en burn-out, c’est parce qu’il y a un décalage de sens. À l’intérieur de la personne qui vit cela, il y a l’idéal de ce qui devrait être. C’est entre autres la confrontation entre cet idéal et la réalité qui génère cette perte de sens.  

Haut Potentiel : quel lien avec le burn-out ?

Le fonctionnement du cerveau d’une personne Haut Potentiel est très stimulé en permanence. Le mental est sur-actif, sur-présent. Les personnes concernées par la douance ont souvent un stress de fond qui est présent.

On le repère dans les différentes phases avant le burn-out. On a d’abord une phase d’alerte qui correspond à un stress ponctuel. Ensuite, on retrouve la phase de résistance, où on va lutter contre ce stress. Les neurotransmetteurs commencent à faire baisser la sérotonine. Pour terminer, on a la phase d’épuisement où on a une chute radicale de tout. Il y a une assimilation et une culpabilisation qui s’installent, et qui est caractéristique des personnes à Haut Potentiel.

Cela vient principalement de ce niveau d’exigence de toujours vouloir faire bien, faire mieux, ou de creuser les sujets. Ce sont des personnes qui en général se surinvestissent.
Quand il y a un cumul de paramètres comme le mental sur-actif, une sur-exigence, du sur-investissement, un désir de vouloir changer le monde, tous ces facteurs-là font que finalement, on est train d’évoluer au sein d’une entreprise pour aboutir à l’objectif pertinent que l’on s’est fixé, notre idéal que l’on perçoit pour l’entreprise.

Ensuite, lorsque l’on prend la réalité telle qu’elle est en face, cela vient nous chambouler et perturber toute cette sorte de sens que l’on ressent. On peut avoir l’impression d’être exigeant, mais que l’entreprise ne produit pas.

Dans le fonctionnement du cerveau Haut Potentiel, il y a également une interaction entre les deux hémisphères droit et gauche, et un corps calleux qui est très actif chez eux. Finalement, il y a une capacité pour un certain nombre à utiliser de façon particulièrement fluide ces deux hémisphères, et d’analyser le réel d’une façon extrêmement complète : elle est à la fois mentale, logique, rationnelle; et à la fois non verbale, sous-jacente, perçue…

Cela fait qu’en entreprise, il y a ce qu’il se dit, et ce qu’il se montre. Ce n’est pas toujours la même chose. Il y a une perception accrue de ce décalage qui fait que même si intellectuellement, il n’y a pas forcément de compréhension de ce qu’il se passe, il existe déjà la perception d’un paradoxe qui est à l’œuvre et qui vient totalement perturber, car il y a une alerte d’incohérence.

À certains moments, on peut avoir un décalage entre l’image que l’on visualise et la réalité. Quand on connait et qu’on apprend à maîtriser son mode de fonctionnement, cela permet de prendre du recul. Quand ce n’est pas le cas, on a toujours l’impression qu’il y a quelque chose qui ne suit pas en soi.

Bénédicte Costedoat-Lamarque tient à souligner qu’un burn-out n’est pas une dépression. On peut tendre vers la dépression sur un burn-out mal pris en charge. Le taux de cortisol est extrêmement bas quand on est en burn-out alors que quand on est en dépression, il est extrêmement haut. Physiologiquement, il y a une vraie nuance qui peut différencier les deux.

Le niveau d’exigence comme source de burn-out

On peut dire que les attentes sont placées trop haut quand il existe un décalage avec la réalité. Dans ce cas, on voit que notre système environnant n’est pas prêt à répondre à nos attentes ou à se mettre en mouvement suivant ce que l’on fait.

S’il n’y a pas cette conscience que l’attente est inappropriée, décalée et incohérente par rapport au fait que le système est prêt, cela met en difficulté voire carrément en échec.
Il est très difficile d’entendre de revoir nos attentes à la baisse. Bénédicte Costedoat-Lamarque conseille aux personnes qu’elle accompagne de se recentrer sur leur périmètre de responsabilité.

Finalement, les personnes à Haut Potentiel ont aussi une énergie importante qui leur permet de pouvoir agir en parallèle sur plein de sujets qui ont du sens pour elles. Mais il y a aussi l’énergie et la motivation intérieure qui font parfois que c’est possible. Simplement, dans cette masse d’activités sur lesquelles elles sont en action, il y a un certain nombre d’activités pour lesquelles elles n’ont que de l’influence, elles ne sont pas maîtres d’œuvre.

Cela peut être représenté par le schéma des trois cercles concentriques. On y retrouve d’abord la zone d’impact, qui est celle sur laquelle Bénédicte Costedoat-Lamarque suggère de se recentrer. C’est la zone sur laquelle on est responsable des actions, du résultat, donc on a la marge de manœuvre pour agir.

Assouplir ou diminuer l’activité sur le cercle autour, qui est la zone d’influence, permet de réaliser que l’on n’a pas la main sur ces activités-là. Mais on peut par contre influencer sur la façon dont elles vont se dérouler. Bénédicte Costedoat-Lamarque conseille de sortir totalement des activités de la dernière zone, qui est celle de l’usure, car on n’a sur celle-ci aucune influence et aucune responsabilité.

En réalité, quand les personnes finissent par décortiquer ce qu’elles font, elles s’aperçoivent qu’un certain nombre d’activités sont sur la zone d’influence ou d’usure. Elles pensent que cela a du sens, que c’est important, que ça leur fait du bien alors qu’en réalité, ce n’est pas le cas.

C’est important de pouvoir évaluer où placer notre énergie, ou au contraire éviter de se battre avec le vent. Cela ne va rien donner à part nous épuiser un peu plus et nous frustrer.
Quand l’esprit est très actif, il est parfois difficile d’être connecté au corps. Il est fondamental de s’entraîner en permanence à être connecté à soi, à ce que l’on ressent. En réalité, on est notre propre matière.

Plus on est à l’écoute de ce que le corps est en train de nous raconter, plus cela va nous permettre de compléter avec pertinence la perception globale que l’on a du système. Effectivement, quand on est Haut Potentiel, ce n’est parfois pas si naturel de faire cela. C’est donc pour cette raison qu’il est fondamental d’acquérir cette habitude, cette conscience globale de soi.

Certaines personnes pensent qu’elles n’arrivent pas à se connecter au corps. Si on prend le temps de se poser, on va ressentir si on est fatigué ou en pleine énergie, si on a des tensions dans le corps ou pas. C’est déjà un début pour ressentir au niveau du corps.

L’importance de se connecter au corps

Parfois on est empêtré soi-même dans son propre marécage. Cela signifie que lorsque l’on est coincé dans une situation, on gigote sans cesse. Du coup, comme dans un marécage, on s’enfonce. Là, on a besoin de quelqu’un sur la rive qui nous tend une corde que l’on va attraper et qui va nous faire sortir de cette situation dans laquelle on est embourbé.

La personne qui nous aide n’est pas forcément la famille, car il y a une implication affective. Cela peut être un coach, un thérapeuthe, peu importe. Quand les personnes que suit Bénédicte Costedoat-Lamarque ont du mal à se connecter au corps, elle partage avec elles ce qu’elle est en train de ressentir.

Cela peut être de la tristesse, de l’oppression, du mal à respirer… Simplement en partageant son ressenti et en faisant l’hypothèse de ce que les personnes ressentent à ce moment-là, celles-ci prennent conscience que cela se passe dans leur corps. Ce n’est pas parce que Bénédicte les aurait influencées. C’est vraiment qu’à un moment, cela se reconnecte dans le circuit. Quand on est dans une émotion comme par exemple la tristesse, cela devient intéressant car c’est de la matière à exploiter pour chercher ce qu’il y a derrière de ce qui en train de se passer. On peut continuer tranquillement et constructivement à creuser sur ce qui émerge de soi.

Une des pires stratégies est de continuer de mettre le couvercle car souvent, il y a une peur de voir tout déborder. Mais plus on en met dans la casserole, plus on ressert le couvercle, et plus à un moment donné il va falloir que ça sorte. À cet instant-là, cela risque d’être submergeant. Quand on apprend tout doucement à accueillir ce qui vient, à se laisser traverser, il n’y a plus rien de submergeant dans tout cela.

Sans aller jusqu’au burn-out, on peut peut-être simplement penser à une situation qui nous a mis en difficulté et dans laquelle on s’est retrouvé en sur-pression intérieure, sans savoir comment agir et sans rien faire, en restant dans l’inertie par défaut de savoir ce qui pouvait être fait. Certaines personnes regardent ce qu’il s’est passé après. En général, ce qui doit se manifester se manifestera d’une façon ou d’une autre. Ce comportement qu’on avait essayé de mettre sous couvercle parce que l’on ne savait pas comment s’y prendre pour avoir un entregent suffisant et acceptable sociétalement, va finir par exploser hors de contrôle.

L’intérêt est de se dire que quand cela émerge, même si ce n’est pas confortable, il faut regarder ce qu’il se passe pour ajuster, agir, voire aller consulter une personne pour nous accompagner et servir de miroir à ce qu’il nous est arrivé. L’inconscient demande à devenir conscient. C’est notre processus d’évolution. Il est intéressant d’anticiper pour ne pas subir.

Peu importe l’histoire de chacun, l’idée est de pouvoir conscientiser ce qu’il se passe et de traverser avec cette conscience pour pouvoir avancer dans ce que la vie nous apporte comme expérience.

Les clés pour prévenir le burn-out

Il est important d’écouter les signes intérieurs du corps d’usure, de fatigue, de maux de tête, de saturation, de culpabilisation, de perte de sa joie intérieure. Beaucoup de signes physiques qui peuvent être intéressants à écouter.

L’environnement, les enfants, le partenaire, les collègues qui peuvent nous trouver plus tendu que d’habitude. Il faut écouter tous les signes de l’extérieur, et de toutes les parties du système, y compris son système interne qui viennent donner l’alerte.

Il est très difficile de se poser en pré burn-out. Si on remarque ces signaux d’alerte, pour soi-même, il peut être compliqué de faire un break ou de prendre du recul sur ce qui nous arrive. Il faut aller voir quelqu’un extérieur à notre entourage pour nous aider à faire cette prise de recul. Il faut trouver une personne neutre, non impliquée sentimentalement.

Il faut également se questionner sur ce que l’on cherche à faire et sur ce que l’on est en train d’essayer d’amener au monde, et si le monde est prêt à recevoir cela. Tout cela pour mettre en perspective toute l’énergie que l’on dépense par rapport à l’énergie que l’on récupère.
Penser aux trois cercles concentriques pour se recentrer sur notre zone d’impact est vraiment d’une grande aide. 

 

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